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La dyspraxie

Dysphasie
Dyslexie
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1-Définition

La dyspraxie est un trouble de la réalisation du geste, secondaire à l’impossibilité (ou à l’anomalie) de programmer automatiquement et d’intégrer au niveau cérébral les divers constituants sensori-moteurs et spatio-temporels du geste volontaire” (Mazeau, 1995).

Tous nos gestes finalisés, tels que porter une cuillère à la bouche, se coiffer…, supposent une gestion coordonnée et complexe de nombreux paramètres spécifiques à chaque geste (mouvements élémentaires, modulations posturales, régulations spatiales et temporelles) faisant l’objet d’une pré-programmation cérébrale.

Chez les dyspraxiques, cette programmation est incomplète voire inexistante. Le geste n’est jamais automatique et nécessite toujours un contrôle volontaire extrêmement fatigant. On peut citer pour exemple l’apprentissage de la conduite automobile où les gestes, une fois appris, sont normalement exécutés sans y penser, sans y prêter une attention particulière, et sans fatigue. L’enfant dyspraxique serait comparable à un conducteur de voiture dont les ressources cognitives sont constamment mobilisées dans les actions à accomplir (tenir le volant, suivre la route, passer les vitesses, faire attention à la circulation, mettre le clignotant…).

Ce trouble peut survenir :

  • Chez des enfants présentant des antécédents particuliers (par exemple : prématurité, tumeur ou accident vasculaire cérébral) ou une symptomatologie neurologique patente (infirmité motrice) cérébrale : on parle de dyspraxie lésionnelle.

 

  • Chez des enfants n’ayant aucun antécédent pathologique mais qui ne construisent pas normalement leurs fonctions praxiques (dysfonctionnement cérébral focalisé) bien que toutes les autres fonctions cérébrales soient normales : on parle de dyspraxie développementale.

La dyspraxie développementale rentre dans le cadre des troubles spécifiques des apprentissages.

  • Il n’y a ni affection médicale générale,
  • ni carence d’apprentissage,
  • ni déficit mental,
  • ni causes psychologiques ou sociales.

Ce trouble touche 3 à 6 % des enfants de 5-11 ans (4 garçons pour 1 fille).

L’association avec les troubles du langage est de 30%.

2- Les différentes formes de dyspraxie.

 

La dyspraxie affecte chaque enfant différemment. Cette hétérogénéité va dépendre de la nature de la tâche dans laquelle les troubles apparaissent (selon qu’il y ait construction ou manipulation d’objets…).

  • La dyspraxie constructive concerne les activités d’assemblage de différents éléments dans l’espace. L’enfant aura des difficultés dans tous les jeux de construction (cubes, legos, mécanos, puzzles…).
  • La dyspraxie constructive visuo-spatiale associe :
  • Un trouble dans l’organisation du geste ;
  • Un trouble du regard (avec ou sans trouble de la vision) qui se traduit par des difficultés dans l’organisation de la motricité des globes oculaires (l’enfant a du mal à explorer un espace donné à la recherche d’un ou plusieurs éléments, il n’arrive pas à fixer ou à suivre une cible) ;
  • Un trouble de la structuration spatiale se traduisant par des difficultés à situer les éléments les uns par rapport aux autres (repérage topologique) mais aussi à orienter les éléments par rapport au corps propre (difficultés de perception des orientations droite/gauche). L’enfant va difficilement accéder à l’espace en deux dimensions (feuille, tableau, écran d’ordinateur…).
  • La dyspraxie gestuelle concerne les troubles de la successivité et de la séquentialité des gestes :
  • La dyspraxie idéatoire se traduit par l’altération de la succession logique et harmonieuse des divers gestes élémentaires nécessaires à la réalisation d’une action complexe, chacun, pris isolément étant exécuté de manière correcte. C’est la planification des différentes séquences du geste qui est atteinte. Généralement, la mise en évidence se fait par des manipulations d’objets : gestes transitifs avec ou sans références corporelles : allumer une bougie avec une allumette, mettre une lettre dans une enveloppe, se peigner…, ordonner des objets.
  • La dyspraxie idéomotrice est la difficulté à réaliser certains gestes bien que le sujet en ait le concept : gestes symboliques à valeur expressive (dire au revoir, envoyer un baiser), gestes de la symbolique conventionnelle (salut militaire, signe de croix,…), gestes de mimer (visser, enfoncer un clou, faire les marionnettes), gestes dépourvus de finalité et de communication.
  • La dyspraxie de l’habillage est la difficulté à agencer, orienter ou disposer les vêtements, pour se boutonner, utiliser une fermeture éclair, faire ses lacets…
  • La dyspraxie orofaciale ou buccofaciale concerne les gestes des organes de la phonation et du visage (siffler, souffler, déglutir…).

Les différents types de dyspraxie sont ici bien différenciés dans un souci de clarté. Mais la réalité est plus complexe. Différentes formes de dyspraxie peuvent coexister et s’intriquer.

La dyspraxie peut également être associée à d’autres troubles neuropsychologiques : troubles du langage, troubles de l’attention/hyperactivité (TDA/H), trouble d’acquisition de la coordination (TAC) selon les auteurs.

Remarque sur la notion de TAC :

TAC et dyspraxie sont souvent assimilés mais actuellement, la tendance est de les distinguer :

=> Le TAC concernerait les coordinations où l’aspect dynamique est au premier plan, acquises sans apprentissage explicite : courir, sauter, attraper une balle…

=> La dyspraxie concernerait davantage les gestes relevant d’un apprentissage explicite et systématisé, finalisé vers un objectif très lié au contexte culturel : écrire, jouer d’un instrument, utiliser des couverts ou des baguettes, s’habiller, faire ses lacets…

3- la dysgraphie

La dyspraxie, qu’elle soit visuo-spatiale ou gestuelle, va forcément retentir sur l’écriture de l’enfant et entraîner une dysgraphie plus ou moins conséquente.

D’une façon générale, on parle de dysgraphie dès lors que l’écriture ne répond pas aux exigences scolaires du niveau attendu pour un enfant et qu’elle implique une mobilisation disproportionnée des ressources attentionnelles. Deux critères sont pris en compte :

– La lisibilité (aspect qualitatif) : forme et tracé des lettres altérés, irrégularités dans la taille et les espacements entre les lettres et les mots, mise en page défectueuse…

– La vitesse d’écriture (aspect quantitatif).

  • La dysgraphie peut donc être « spécifique » et s’inscrire dans le cadre d’un trouble de la coordination motrice, de troubles visuospatiaux, d’un trouble du langage, ou encore d’un déficit des  fonctions exécutives.

Exemple de dysgraphie d’origine visuospatiale :

Antoine, 11 ans ½ , classe spécialisée.

  • La dysgraphie peut également s’exprimer dans d’autres cadres : déficience intellectuelle, précocité, troubles psychoaffectifs, absentéisme scolaire… On parle alors de dysgraphie « non spécifique ». Dans la littérature, on retrouve ainsi le terme de dysgraphie «prétexte » pour exprimer les difficultés psychoaffectives, ou encore de dysgraphie « réactionnelle»  qui peut traduire un refus du modèle scolaire. Une mauvaise intégration du schéma corporel, des problèmes de latéralité non ou mal résolus, une mauvaise tenue de l’instrument ou une position inadéquate peuvent également retentir sur la qualité d’écriture.

L’écriture est une activité motrice fine, hautement complexe et différenciée, longuement et difficilement construite. La maturité de l’enfant pour l’écriture est très variable : 30 % des enfants ne maîtrisent pas leur motricité fine avant l’âge de 7-8 ans.

Tous les enfants dyspraxiques sont dysgraphiques (à des degrés divers…). MAIS les dysgraphiques ne sont pas forcément dyspraxiques.

 

4- Quelques repère développementaux

Certaines habiletés font normalement partie des apprentissages de tout enfant, à notre époque et dans nos sociétés (influence déterminante de l’aspect culturel). Ces habiletés requises à certaines étapes de développement vont être utilisées pour évaluer les acquisitions des enfants à un âge donné.

Ainsi, on pourra facilement s’assurer des performances praxiques de l’enfant au travers de certaines tâches : empilement de cubes, graphisme, vie quotidienne (habillage, repas…).

Le tableau suivant regroupe les principales acquisitions motrices au cours du développement de l’enfant.

0-1 an

Tenue de la tête (4 mois)

Attrape des objets, prise palmaire (6 mois)

Tient assis (9 mois)

Station debout (10 mois)

Marche à 4 pattes

Marche en se tenant aux meubles ou tenu par les mains (11 mois)

1-2 ans

Aligne les cubes pour faire un train  

Construit une tour de 4 à 6 cubes (24 mois)

Encastre toutes les formes simples (rond, carré, triangle)

Dévisse et revisse

Mange seul

Shoote dans un ballon

Pédale sur un tricycle

Saute à pieds joints

Tient en équilibre sur un pied quelques secondes

Marche sur la pointe des pieds

Trace des traits horizontaux

Lance une balle à 1-2 mètres (mouvement limité)

Attrape un ballon de 40 cm de diamètre, bras tendus

Déboutonne, commence à s’habiller seul

2-3 ans

Commence à maîtriser la prise du crayon tripode

Reproduit un rond, une croix sur modèle

Dessine un bonhomme « têtard » (tête + autre partie)

Fait des emboîtements gigognes et des puzzles simples

Reproduit le pont avec les cubes

Tour de 8 cubes

Enfile des perles

Saute à cloche pied 2-3 fois

Saute pieds joints d’une marche

Lance une balle à 2-3 mètres

Attrape un ballon de 40 cm avec ajustement des bras

Boutonne 

Met ses chaussures

4-5 ans

Descend les escaliers un pied par marche

Tient en équilibre sur un pied 4 à 8 secondes

Attrape un ballon de 25 cm de diamètre

Reproduit un carré

Lance un ballon de 25 cm de diamètre à 4-5 mètres

Saute bien à cloche pied

Tient son crayon entre le pouce et l’index

Trace quelques lettres bâtons, écrit son prénom

Construit une tour de 10 à 16 cubes

Construit une pyramide avec les cubes 3-2-1

5-6 ans

Reproduit un triangle

Dessine un bonhomme complet (tronc)

Sautille

Attrape une balle après rebond

6-7 ans

Reproduit un losange

Apprend l’écriture cursive

Fait un nœud de lacet (6-8 ans)

Disparition des syncinésies* qui accompagnent les mouvements fins

Saute à cloche pied sur 5 mètres

7-8 ans

Saute 1 mètre en longueur pieds joints

10 ans

Recopie un cube

Si l’enfant n’a aucune difficulté motrice analytique, aucune anomalie  orthopédique ou musculaire, et s’il est normalement performant sur le plan intellectuel, un décalage marqué dans ces acquisitions sera alors un signe d’appel à ne pas négliger.

5- Diagnostique de dyspraxie

Les signes d’alerte :

En motricité globale :

  • L’enfant dyspraxique court de façon désordonnée, n’arrive pas à coordonner les bras et les jambes ;
  • Il a du mal à apprendre à nager ;
  • Il a du mal à faire du vélo, il lui est difficile de pédaler, préfère pousser avec les pieds ;
  • Il a parfois du mal à marcher surtout en terrain accidenté (forêt, montagne, sable..);
  • Il se cogne souvent, se prend les pieds dans les obstacles, tombe, a souvent des “bleus” ;
  • Il descend les escaliers avec difficulté ;
  • Il saute difficilement, a du mal à s’équilibrer sur un pied, à sauter à cloche pied ;
  • Il a du mal à lancer et rattraper un ballon ;
  • Il a des problèmes de tonus musculaire (ex : il a du mal à fermer les portes, à dévisser le bouchon d’une bouteille…).

En motricité manuelle :

  • Il est maladroit : tout ce qu’il touche se renverse, se casse, tombe, se déchire ;
  • Les travaux manuels ne l’attirent pas ;
  • Il est lent, malhabile, le résultat de son travail est grossier, brouillon ;
  • Il a besoin d’aide pour s’habiller (laçage, boutonnage), pour se laver, s’essuyer ;
  • Il mange lentement, «salement», n’arrive pas à couper sa viande, ni à éplucher les fruits ;
  • Il a du mal à retrouver ses affaires, à ranger, à s’organiser, il oublie son cartable ;
  • Il ne peut se servir d’une règle, d’un compas, d’une gomme, d’une paire de ciseaux.

 

En graphisme :

  • Dès la maternelle, il ne peut réaliser les figures attendues à son âge (rond, croix, bonhomme têtard, carré). Ses dessins sont pauvres, souvent qualifiés d’immatures ;
  • Les productions sont sales, gribouillées. Les feuilles sont parfois trouées car l’appui sur la mine est trop important ;
  • Il tient mal son crayon, a du mal à écrire son prénom, n’accède que très difficilement à l’écriture cursive et préfère écrire en lettres bâtons (mais a du mal à tracer les obliques) ;
  • En grande section, le manque de progrès et/ou la stagnation dans les exercices graphiques (dessins, formes préscripturales) doivent alerter ;
  • En CP, le décalage est flagrant avec l’apprentissage de l’écriture. L’enfant dyspraxique-dysgraphique est handicapé par l’inefficacité de son geste qui le rend trop lent et/ou illisible.

 

Au niveau perceptif visuo-spatial :

  • Il n’aime pas les jeux de constructions (puzzles, legos, mécanos…) ;
  • Il a des difficultés pour analyser les relations spatiales, la trajectoire, la localisation d’une cible dans l’espace, les diagonales et les obliques.

Mais : c’est un enfant vif, intelligent, qui adore les récits et les histoires, invente des jeux de rôle élaborés, a une culture générale étendue (pose sans cesse des questions).

  • Le diagnostic doit être établi le plus tôt possible afin de minimiser les conséquences psychologiques de ce handicap s’il n’est pas reconnu en tant que tel (perte de confiance en soi, troubles du comportement, dégoût de l’école…). Il ne doit pas se faire avant 4 ans mais devient trop tardif à 9 ans.

Celui-ci repose sur :

  • Le témoignage des parents ;
  • Les plaintes scolaires ;
  • Un bilan psychométrique obligatoirement attestant d’une dissociation significative entre les performances gestuelles et les performances verbales, raisonnementales et conceptuelles ;
  • Une équipe pluridisciplinaire (Centres de Référence, CAMSP, structures spécialisées) qui réalisera les différents examens et bilans (neuropédiatre, médecin de rééducation, neuropsychologue, ergothérapeute, psychomotricien…).

Il est important de rappeler que la dyspraxie est à différencier du retard de développement ou d’apprentissage. On ne suspectera une dyspraxie que si l’enfant a été normalement exposé à l’apprentissage de tel ou tel geste (ce qui suppose une stimulation suffisante conjointement à l’exposition spontanée liée à l’environnement). Il s’agit en effet d’un trouble durable de la planification automatique des gestes.

6- Conseils : comment aider un enfant dyspraxique

La dyspraxie peut avoir un retentissement sur l’ensemble des apprentissages scolaires.

Les enfants présentant une dyspraxie visuo-spatiale peuvent éprouver des difficultés dans toutes les tâches où les composantes spatiales sont importantes : lecture, géométrie, calcul (pose des opérations dans l’espace), géographie.

La dyspraxie gestuelle va entraîner des difficultés dans toutes les manipulations d’outils et les tâches d’organisation (trousse, classeurs, cartable…).

La dysgraphie va entraîner une lenteur dans la prise de notes et bien souvent des difficultés de relecture des leçons. Sans parler de la fatigue et du retard accumulés pour toutes ces tâches qui demandent à l’enfant dyspraxique des efforts de concentration décuplés et qui ne le rendent plus disponible aux apprentissages en question.

Malgré la prise en charge précoce et les rééducations, l’enfant dyspraxique le restera et il est nécessaire d’apporter des aides et adaptations pour faciliter sa scolarité.

Veiller à la stabilité de la posture en classe :

  • Permettre à l’enfant d’être au premier rang ;
  • Table et chaise doivent être à la bonne hauteur, l’enfant doit avoir les pieds posés au sol. Il peut être intéressant d’incliner le plan de la table pour les activités d’écriture.

Limiter les exigences :

  • Accepter que des matières resteront plus difficiles et valoriser les réussites de l’enfant ;
  • Ne pas lui donner plusieurs consignes à la fois, éviter les « doubles tâches » ;
  • Parfois, il n’arrivera pas à reproduire avec succès quelque chose qu’il a réussi le matin même ou auparavant. Il faut donc être patient avec lui et ne pas le stresser ;
  • La répétition n’améliore pas la qualité : il est inutile de demander à l’enfant de recopier le même mot plusieurs fois par exemple ;
  • Au primaire, limiter l’écriture manuelle autant que possible : fournir des photocopies plutôt que de faire recopier inutilement poésie, devoirs…ou bien prévoir un système de tutorat avec un autre enfant. Ne pas garder l’enfant en classe lors des récréations pour qu’il finisse de copier une leçon ;
  • Moduler les exigences en terme de précision, vitesse, taille et choix de la typographie (lettres bâton ou « attachées »). Si l’objectif est de promouvoir la vitesse, accepter une production moins précise ;
  • Ne pas proposer de maintien en maternelle à cause de son retard en graphisme (l’enfant dyspraxique progressera mais le handicap sera toujours présent).

 

Adapter les outils et les supports :

  • Pour les contrôles, prévoir des exercices plus courts, aménagés en fonction de la lenteur de l’enfant (exercices à trous) ou encore des évaluations orales ;
  • Utiliser des guides-doigts si besoin :

  • Utiliser des lettres ou étiquettes mobiles que l’enfant pourra manipuler plutôt que de passer par l’écrit pour les dictées de mots ou de syllabes par exemple ;
  • Utiliser un code couleur pour aider au repérage dans la feuille et à la verbalisation des tracés : la ligne du haut, de couleur bleue matérialise le ciel. Celle du bas, de couleur marron symbolise la terre. L’enfant démarre au feu vert (matérialise le côté gauche de la feuille, de la table, le bouton gauche de la souris…) et il s’arrête au feu rouge (matérialise le côté droit de la feuille, de la table, le bouton droit de la souris) ;

  • Adapter le lignage des cahiers selon l’intensité de la dysgraphie. Utiliser des cahiers à une seule ligne ou bien « grands carreaux » mais avec une plus grande interligne (cahiers seyes 3 mm). Reprendre le même code couleur pour le tracé des lettres (ex : le « l » monte jusqu’au ciel) ;

  • L’écriture des nombres peut être source d’erreurs de position dues aux difficultés spatiales (l’enfant écrit 34 pour 43, par exemple). On peut également appliquer un code couleur : en bleu les unités, en rouge les dizaines, en vert les centaines et en jaune les milliers comme ceci :

1234

 

  • La pose des opérations en colonnes nécessite un alignement strict des chiffres et bien souvent les difficultés motrices ou praxiques sont à l’origine d’erreurs d’écriture alors que le principe est compris. Puisque la pose d’opérations en colonnes n’est qu’une technique parmi d’autres, il est préférable de proposer à certains enfants la pose en ligne avec utilisation des repères de couleur ;

Ex : 3 + 10 = 13

  • En cas de nécessité de pose des opérations en colonnes, on peut utiliser des tableaux et des couleurs pour visualiser la position des dizaines, des centaines…

  • Pour les activités de dénombrement, utiliser des objets à déplacer plutôt que des éléments dessinés sur une page ou accepter que l’enfant barre les éléments dessinés au fur et à mesure du comptage.
  • Simplifier les fiches : aligner les éléments autant que possible pour rendre le balayage du regard de gauche à droite plus efficace.

Exemple :

  • Pour faciliter l’organisation, la recherche et le rangement des cahiers, on peut attribuer une couleur par matière :

Poésie  Lecture  Maths  Grammaire  Sciences et vie de la terre

 

Les aides techniques ou Matériel Pédagogique Adapté (MPA) :

La nécessité pour un élève de disposer d’un matériel pédagogique adapté est appréciée par l’équipe pluridisciplinaire de la commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) dans le cadre du Plan Personnalisé de Scolarisation (PPS).

 

  • Quand avoir recours à l’ordinateur en classe ?

L’utilisation de l’ordinateur en classe pourra être proposée sur avis ergothérapique en fonction du décalage de l’enfant en termes de lisibilité et d’effort fourni et surtout si ce décalage se creuse dans le temps.

 

       Il nécessite obligatoirement :

  • Un apprentissage en séances d’ergothérapie ;
  • Un partenariat entre l’enfant, la famille, l’équipe pédagogique et l’ergothérapeute ;
  • Une formalisation lors du Projet Personnalisé de Scolarisation.

Certains enfants ne pourront pas utiliser un clavier en raison de l’importance de leurs difficultés motrices, d’autres auront une frappe tellement lente et coûteuse qu’il faudra leur proposer d’autres moyens de suppléance : claviers virtuels, dictée vocale…

Le choix s’effectue en fonction de plusieurs critères : potentiel moteur, visuel et cognitif de l’enfant, exigences scolaires.

 

  • Logiciels existants :

Il existe différents logiciels adaptés à la dyspraxie :

  • Aides à l’écriture: le logiciel Médialexie intègre la fonction « dictée vocale ».
  • Aides à la géométrie : Trousse GéoTracé (gratuit) ; Cabri géomètre II plus.
  • Autres aides :

L’enfant peut également avoir recours au dictaphone pour enregistrer les devoirs par exemple, au lieu de les recopier.

 

Les aides humaines :

Le recours à un Auxiliaire de Vie Scolaire  pourra également venir compléter cette aide. Il permettra à l’enfant de se dégager des tâches qui lui posent problème (organisation du classeur, découpage, collage…) et de le rendre ainsi plus disponible aux apprentissages en lui évitant d’accumuler une trop grande fatigue.

Les aides rééducatives :

Il est indispensable que l’enfant dyspraxique bénéficie de rééducations :

  • En psychomotricité si l’enfant est jeune (travail global à partir du corps et du vécu corporel, structuration spatiale et temporelle, …) ;
  • En ergothérapie :
  • dès que des adaptations matérielles ou pédagogiques sont nécessaires, en classe ou au quotidien.
  • dès que l’ordinateur est préconisé : seul un ergothérapeute pourra juger de la méthode à adopter pour cet apprentissage (nombre de doigts pour la frappe, installations et adaptations du clavier et/ou de la souris, logiciels spécialisés utiles, introduction du matériel en classe…).

Valoriser les points forts de l’enfant, s’appuyer sur ce qui fonctionne bien :

  • Le plus souvent, la voie auditivo-verbale:
  • La mémorisation ne passe pas forcément par l’écrit et la trace. Il est inutile de faire copier plusieurs fois les mots de dictée préparée, mieux vaut apprendre à l’enfant à les épeler ;
  • Habituer l’enfant à verbaliser ce qu’il doit faire avant de réaliser une action.
  • Développer l’imagination, les représentations mentales. Pour l’apprentissage de l’écriture par exemple, verbaliser les tracés (pour faire un rond, dire : « tu dessines le rond du soleil »…). Il existe des méthodes d’apprentissage verbal du tracé des lettres (ex : la Planète des Alphas, la méthode du petit chien de J. Jeannot) ;                                                              
  • Favoriser le découpage séquentiel des tâches (par exemple pour sauter : « je plie d’abord les genoux, je mets les bras vers l’arrière »…) ou pour ranger le cartable par exemple, expliciter les différentes étapes…). Utiliser une méthode de lecture analytique.
  • Développer les voies kinesthésique et proprioceptive en proposant à l’enfant de réaliser le geste ou le mouvement les yeux fermés par exemple.
  • En sport permettre à l’enfant de participer sans souffrir de sa maladresse : arbitrage, constitution des équipes, chronométrage…

Autres aménagements :

Des dispenses de certaines matières pourront être envisagées pour permettre les rééducations sur le temps scolaire car il est important de ne pas trop surcharger les journées de ces enfants, déjà lents et fatigables.

Des aménagements des conditions d’examens ou des concours sont prévus par la loi pour les enfants en situation de handicap : se référer à la circulaire 2003-100 du 25 Juin 2003.

C’est l’analyse des tâches scolaires, des habitudes pédagogiques, du potentiel et des incapacités en situation de handicap, pour un enfant donné, qui permet de déterminer le type d’aménagement pour cet enfant. Les besoins de l’enfant sont à réévaluer chaque année en fonction de son évolution.

7- Conclusion

La dyspraxie est un handicap invisible au premier abord mais dont les répercussions scolaires, psychologiques et sociales vont être douloureuses si elle n’est pas diagnostiquée.

Le diagnostic doit se faire le plus tôt possible pour pouvoir proposer des aides et adaptations spécifiques permettant d’accompagner au mieux l’enfant dans ses apprentissages.

Ces aides devront être décidées collectivement avec tous les intervenants : l’enfant, les parents, l’enseignant, le médecin scolaire, les professionnels spécialisés

Parallèlement, la prise en charge rééducative de ces enfants est souvent transdisciplinaire (psychomotricité, ergothérapie, orthoptie, parfois orthophonie en cas de troubles du langage associés…) et de longue haleine.  Il est nécessaire d’articuler ces aspects dans un projet individualisé cohérent et ciblant les priorités afin de ne pas surcharger l’enfant. Il est tout aussi important, chez ces enfants qui sont compétents dans de nombreux domaines (langage, culture générale, musique, raisonnement…) de conserver un équilibre entre les moments qui réclament de laborieux efforts dans le but de progresser, et les moments de loisirs, de détente, de plaisir, qui sont également des moments indispensables et très constructifs pour la personnalité et l’avenir du jeune.

« Parce qu’avant tout, un enfant reste un enfant…

Le parcours du combattant des familles… »

8- Conseils : Comment aider un enfant dyslexique ?

Reconnaître ses difficultés, c’est reconnaître :

  • Qu’il lui faut du temps, donc accepter sa lenteur.
  • Qu’il a souvent une mémoire à court terme défaillante (nécessitant une répétition des consignes).
  • Que son attention ne peut être soutenue longtemps.
  • Qu’il a du mal à se concentrer et qu’il est particulièrement sensible au bruit.

Comment l’aider au sein du groupe classe ?

  • Le placer devant, face au professeur, seul ou à côté d’un enfant calme.
  • Écrire gros et peu au tableau, utiliser la couleur, épeler les mots difficiles.
  • Éviter le bruit, particulièrement pendant sa prise de parole.
  • Valoriser sa participation orale et surtout l’encourager.
  • Lui faire découvrir ses domaines de compétences et le valoriser face au groupe classe.

Comment faciliter son travail écrit ?

  • Donner une seule consigne à la fois et s’assurer qu’elle soit comprise.
  • Restreindre la quantité d’écrits sans pour autant en négliger la qualité.
  • Donner des codes d’abréviations pour la prise de notes.
  • Éviter de lui donner des textes manuscrits.
  • Éviter la lecture à voix haute si l’enfant est gêné pour accéder au sens.
  • Fournir des photocopies pour alléger la tâche de copie.
  • Donner peu de travail à réaliser à la maison quelle que soit la classe.

Comment l’aider dans son organisation ? 

  • L’aider à répartir son temps selon le nombre d’exercices et l’aider dans la succession des tâches à faire.
  • Le laisser répondre aux questions dans le désordre et l’encourager à sauter les questions qu’il ne sait pas résoudre.
  • Rythmer les activités : éviter de placer une leçon compliquée après une dictée ou une activité lui ayant demandé une dépense d’énergie importante.
  • L’aider dans le démarrage de son activité.
  • Lui restituer les consignes de façon personnelle avec des phrases courtes et des mots simples et s’assurer qu’il les a comprises et qu’il en a mémorisé la succession.
  • Faire un contrat de travail avec lui à court terme avec des objectifs à atteindre afin d’éviter qu’il ne se sente d’emblée dépassé par le rythme et le rendement des autres (notes, nombre de fautes, nombre d’exercices à faire).

Concernant les évaluations :

  • S’assurer que les consignes soient bien comprises en lui demandant de les reformuler.
  • Le sécuriser en débutant par une restitution pure et simple de la leçon.
  • Lui demander une correction partielle mais rigoureuse.
  • Ne pas lui faire copier plusieurs fois une leçon ou une correction.
  • Donner éventuellement deux notes, une pour l’exercice fait, une pour le devoir entier.
  • Le féliciter quand il passe de 25 fautes à 15 fautes même s’il a toujours 0.
  • Donner des appréciations encourageantes sur la copie en prenant en compte les efforts fournis.
  • La note est le reflet de l’objectif demandé (note de présentation ou d’argumentation).
  • Sur les bulletins, éviter tout épithète dévalorisant et injuste par rapport à son handicap (« écriture illisible, ne fait pas d’effort»).
  • Alléger les évaluations si on ne peut pas lui aménager plus de temps.

Concernant les aménagements des examens de l’enseignement scolaire pour les enfants atteints de dyslexie:

Un temps supplémentaire peut être accordé sur avis de la MDPH (Circulaire du 23 avril 2003 recteur académie de Rennes, Mise à jour 4ème trimestre 2004).

Concernant les outils:

La dyslexie-dysorthographie peut être l’indication à utiliser du matériel informatique en tant qu’outil palliatif. Ceci nécessite une réflexion pluridisciplinaire avec bilan ergothérapique. Il est indispensable d’évaluer les répercussions sur les apprentissages avant de définir les aménagements pédagogiques les mieux adaptés. Ce projet doit tenir compte des attentes de l’enfant et de son potentiel existant. De tels aménagements sont à formaliser dans le cadre d’un Projet Personnalisé de Scolarisation (dispositif relevant de la  MDPH) ou d’un PAI (dispositif interne à l’établissement), (cf annexe) en y associant l’équipe pédagogique, les parents, l’orthophoniste, l’ergothérapeute, le médecin scolaire, l’enseignant référent….l’enfant restant le principal acteur de son projet.

  • Outils informatiques :

Certains logiciels peuvent être proposés pour la dysorthographie (correcteurs orthographiques) et pour la dyslexie (logiciels d’aide à la lecture) comme :

– Le logiciel de reconnaissance vocale type : « Dragon Naturally Speaking». La dictée vocale permet de rédiger des textes sans être pénalisé par les problèmes orthographiques.

– Le logiciel « Medialexie» plus complet que le précédent. Il se présente sous la forme d’une barre d’outils constituée de plusieurs fonctions pour  éditer, corriger, dicter, lire, visualiser du texte qu’il est aussi possible de transcrire à partir d’un enregistrement audio.

– Il existe d’autres logiciels moins complets mais parfois suffisants pouvant répondre aux besoins des enfants dyslexiques : Kurzweil 3000, Sprint Dyslexie, Doc Reader, Antidote, SpeakBack, Omnipage…sans oublier les ressources freewares.

 

  • Outils pédagogiques :

– Méthode de lecture basée sur la manipulation : « La planète des Alphas » est une méthode ludique qui permet de développer la conscience phonémique, elle est  basée sur le principe alphabétique pour que l’enfant mette en relation les sons avec les signes graphiques. Les outils sont multiples : livres de contes, CD audio, DVD, figurines, posters, recueils de textes progressifs de lecture, jeu de cartes, loto, fiches pédagogiques…

Outils plus simples : certains outils utilisés chez l’enfant dysphasique peuvent aider les enfants dyslexiques comme la méthode syllabique, la méthode des jetons, la grammaire en couleur, les gestes BOREL MAISONNY, les QCM…..

– Un livret d’accueil et de suivi de l’enfant dyslexique peut être mis en place en collaboration avec le médecin de l’éducation nationale, les enseignants, l’orthophoniste et la famille. Ce document appartient à l’élève et à sa famille. Il suit l’enfant pendant sa scolarité jusqu’à la fin du collège. Il a pour objectif d’expliquer les difficultés de l’enfant, de faire un lien entre l’enfant, sa famille et l’équipe pédagogique, et de mettre en place des adaptations. (Consultable sur le site de l’éducation nationale)

Des aménagements des conditions d’examens ou des concours sont prévus par la loi pour les enfants en situation de handicap : se référer à la circulaire 2003-100 du 25 Juin 2003.

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9- Conclusion

Le diagnostic de dyslexie-dysorthographie reste un diagnostic pluridisciplinaire qui repose sur des bilans (médical, orthophonique, psychologique). Les délais sont parfois longs mais il est important de prendre son temps pour bien cerner les difficultés de l’enfant afin de proposer une prise en charge appropriée.

La réussite scolaire d’un enfant dyslexique dépend en grande partie du soutien parental et pédagogique qui lui est apporté. Il est essentiel que parents et enseignants acquièrent une bonne compréhension des difficultés rencontrées par l’enfant pour l’accompagner dans ses apprentissages tout en cherchant à préserver le plaisir d’apprendre.

L’enfant doit pouvoir bénéficier d’adaptations pédagogiques et de soutiens différenciés au cours de sa scolarité. Ces adaptations doivent être définies dans le cadre d’une équipe pluridisciplinaire réunissant parents, enseignants, médecin scolaire, réseau d’aide, orthophoniste…

Références et liens :

 

Références bibliographiques :

  • CHEMINAL R. et BRUN V., Les dyslexies, édition Masson, 2002.
  • VEBER F. et RINGARD JC., Plan d’action pour les enfants atteints d’un trouble spécifique du langage, rapport du ministère,  mars 2001.
  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie, bilan des données scientifiques, expertise collective, édition Inserm 2007.
  • ODEDYS iufm, Académie de Grenoble, version 2 (septembre 2005).
  • DELAHAIE M., L’évolution de langage chez l’enfant » : de la difficulté au trouble, édition Inpes, Juin 2004.
  • L’élève dyslexique dans le primaire, APEDYS France (numéro 4 octobre 2000).
  • L’état des connaissances, troubles spécifiques des apprentissages, Signes Editions, 2004.
  • L’apprentissage de la lecture à l’école primaire, Observatoire national de la lecture, rapport de l’inspection générale de l’EN, 2005, site du ministère
  • Lecture et dyslexies, Editions Les Pluriels de Psyché, 1997
  • CRUNELLE D., Dyslexie au collège : quelles pédagogies, quelles remédiations ?, CRDP Nord-Pas-de-Calais
  • DEMEUR A. et NAVET P., Méthode pratique de rééducation de la lecture et de l’orthographe,  Editions Belin, 1986
  • CHAUVEAU G. et MAYO C., Il a du mal à apprendre à lire, Editions Albin Michel, 2003
  • BOISSEAU P., Enseigner le langage oral en maternelle, Editions RETZ-CRDP Versailles 2005
  • SOUSA D., Un cerveau pour apprendre, Editions Chénelière éducation, Canada
  • PAQUETTE CHAYER M., Comprendre la lecture, Editions Chénelère éducation, Canada.